jeudi 18 août 2022

Se soigner pendant l'allaitement

Cet article a été publié dans le hors-série 13 du magazine Grandir Autrement, dans le dossier "De la difficulté d'être un parent à l'écoute" disponible pour 3 euros dans la boutique en-ligne du magazine (magazine qui a grandement besoin de notre soutien). 

 Je suis heureuse de partager cette interview de Pauline qui a écrit plusieurs articles de fond pour BLO il y a quelques années. Cet entretien date de 2019... Je récupère mon retard... Si vous avez besoin d'une chouette sage-femme, Pauline est au Framboisier. Je recommande aussi Philippine qui fait partie de cette superbe équipe.



 Se soigner pendant l'allaitement 

Anaïs Tamen


Rencontre avec Pauline Soupa, sage-femme indépendante et hospitalière, initiatrice de cercles de femmes enceintes autour du post-partum, à Bruxelles. Ces cercles sont l'occasion pour les femmes d'échanger leurs expériences, de retrouver les bienfaits de la sororité et d'en apprendre davantage sur une période souvent négligée pendant la grossesse où le suivi est concentré sur la naissance... Alors, comment prendre soin de sa santé pendant l'allaitement ?


Grandir Autrement : Comment booster son système immunitaire pendant l'allaitement ?


Pauline Soupa : Le plus important c'est de faire attention à son sommeil : c'est le plus grand manque que vivent les femmes, surtout quand ce n'est pas leur premier enfant. Il faut se discipliner et, en fonction de comment se passent les nuits, s'endormir au moins une fois par jour juste après avoir allaité son bébé. Sous l'influence de l'ocytocine produite lors de l’éjection du lait, la mère tombe directement en sommeil profond et ce sommeil est particulièrement récupérateur. Pour cela il faut se préparer à la sieste. Donc, avant d'allaiter, aller faire pipi, éteindre son téléphone, préparer un petit coin avec tout se dont on a besoin pour ne pas avoir à se relever. Si on se relève pour vite faire quelque chose pendant que l'enfant dort, l'effet des hormones ne fonctionne plus. Faire cela deux fois par jour c'est encore mieux ! En fonction des besoins, cela peut s’inscrire dans une routine quotidienne.


S'offrir une alimentation la plus vivante et nourrissante possible est aussi important2. Manger des légumes variés et de saison, des amandes qui sont galactogènes, du sésame, du miso, des algues, du miel, du pollen, des légumineuses, et aussi, quand on en consomme, des protéines animales qui, en Médecine Traditionnelle Chinoise (MTC) favorisent la récupération du Qi et du Sang3 après la naissance. En MTC, on évite les aliments froids, et on préfère les bouillons et tout ce qui cuit lentement. Chaque culture a au moins un plat spécialement dédié aux femmes en post-partum, comme la harira marocaine. A nous de questionner nos ainé-e-s pour retrouver ce savoir.


La femme allaitante, surtout après la naissance, doit adapter son rythme, c'est à dire ralentir et trouver du soutien, surtout quand il y a un ou des aîné-e-s.


Quand il y a des personnes malades dans l'entourage, notamment des enfants scolarisé-e-s qui ramènent parfois des virus de l'école, on peut, en préventif, diffuser des huiles essentielles dans l'espace de vie. Le Ravintsara est une des huiles essentielles (HE) qui est compatible avec l'allaitement. Pour les diffuser, les règles sont : en dehors de la présence des enfants. Si notre bébé à moins de 3 mois, il faut consulter un-e spécialiste avant d'utiliser des HE. De manière générale, il vaut mieux consulter une personne formée en aromathérapie ou un-e herboriste, car certaines huiles sont déconseillées avant 3 ans, d'autre avant 6 ans, et pour celles qui sont autorisées, les posologies et voies d’administration sont à adapter. Une alternative, plus douce avec moins de contre-indications que les HE : les hydrolats. Là encore, il est bon de prendre conseil.


Comme remède préventif, on peut faire une cure de propolis, d'extrait de pépins de pamplemousse ou de teinture mère d'échinacéa.


De manière générale, prendre soin de soi le plus possible c'est la base.


Prendre soin de soi ce n'est pas évident avec un.e tout.e petit.e...


Oui, le congé maternité n'a de « congé » que le nom. Je mets en garde les femmes qui accouchent l'été car parfois elles ne pensent pas du tout à prévoir du soutien pour les ainées. Elles se disent : « c'est super, les enfants seront à la maison... ». Or, ce n'est pas à celle qui vient d'accoucher de s'occuper des plus grand-e-s. Il faut une personne ressource pour toute la durée du 4ème trimestre, c’est ainsi qu’Ingrid Bayot, sage-femme québécoise, appelle la la période toute particulière que constituent les 3 premiers mois de vie du bébé. Dans toutes les cultures il y a cette période de repos pour la femme. Dans le Coran, c'est la symbolique des 40 jours après la naissance durant lesquels la femme s’abstient de certains actes (jeûne, rapports sexuels, …) mais surtout est assistée par d’autres femmes. En Europe et particulièrement en France, les relevailles étaient traditionnellement la cérémonie catholique qui permettait aux femmes de réintégrer les lieux de culte après un temps de repos chez elle ou elles étaient soutenues par les autres femmes de l’entourage. Désormais, nous sommes propulsées dans un quotidien fou juste après la naissance. Et les femmes aussi entrent dans cette dynamique. J'entends certaines femmes que j’accompagne dire « J'en profiterai pour faire ci ou ça... ». Sortir pour soi, se faire du bien, pour rencontrer des personnes encourageantes, oui. Répondre à des impératifs, non !



Et si la mère / le parent allaitant tombe malade ?


Je crois qu'on peut raisonnablement dire que la maladie vient comme un signal pour la mère et dans la grande majorité des cas, c'est un signe de grande fatigue. C'est donc le moment de questionner son quotidien, même si on avait l'impression d'avoir déjà ralenti. Le moment de se dire : « ok, je n’avais pas l'impression d'en faire trop mais qu'est-ce que je peux encore retirer de mes épaules ? Ou puis-je trouver du soutien ? ». La question du soutien et des personnes ressources, est à se poser durant la grossesse, avec le/la partenaire quand il y en a un-e.


Quand la maladie est là, on évite de s'auto-médicamenter. Que ce soit des médicaments allopathiques ou avec des alternatives naturelles, il vaut mieux demander conseils à quelqu'un qui s'y connait quand on n’est pas sûre de ce que l'on peut prendre ou pas.


Il est aussi important d'éviter les carences et, quand on en a, de les prendre au sérieux, surtout les carences en fer qui génèrent une fatigue chronique qui affaiblit le système immunitaire.


Peux-t-on allaiter quand on est malade ?


Oui, bien sûr, sauf dans quelques situations particulières : HIV, hépatite C si associée à des crevasses qui saignent par exemple.

Quand la mère tombe malade, elle transmet à son bébé les anticorps qu'elle fabrique. Comme le bébé suit sa mère partout, c'est très pratique. Le système immunitaire de la mère réagit plus vite que celui du bébé et elle lui transmet ce dont il a besoin pour se défendre.


Quand on a une intoxication alimentaire, une infection ORL,… bien sûr que l'on peut continuer à allaiter ! On doit respecter les règles d'hygiène de base : se tourner et éternuer ou tousser dans ses mains, puis bien se laver les mains.


Si on a une maladie chronique, dans la plupart des cas, on peut continuer à prendre son traitement et allaiter. Surtout, il ne faut pas décider d'arrêter seule un traitement. Je pense notamment aux femmes en dépression ou celles qui font de l'hypertension. Mieux vaut en parler à son médecin pour obtenir une alternative compatible.


Certains médecins proposent d'arrêter l'allaitement...


Cela peut arriver, et si une professionnel de la santé vous conseille d’arrêter l’allaitement alors que ce n’est pas votre souhait du moment, demandez un second avis. Beaucoup de professionnels de la santé ne sont pas assez formés au sujet de l'allaitement. J'ai déjà eu le cas d'un médecin conseillant à une mère qui avait une mastite de stopper immédiatement l'allaitement ! Or en cas de mastite, c'est bien la dernière chose à faire !


Les mères sont assaillies de conseils. Il faut nous rappeler que chaque situation est unique et que ce qui est bon pour notre meilleure amie ou notre voisine, ne l'est pas forcément pour nous.


1. www.leframboisier.be

2. Lire dans ce dossier « L'alimentation de la mère qui allaite »

3. en MTC, le Qi est l'énergie primordiale présente en toute chose, qui circule dans l'être et son environnement, et le Sang est le fruit de l'énergie de la nourriture, il est le sang tel que perçu en médecine occidentale et aussi l'énergie de ce liquide organique.

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